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La Guyane et les enjeux de son développement touristique



Quel beau département que notre terre française en Amazonie ! Une destination qui reste confidentielle, mais qui ne ressemble à aucun de nos autres territoires ultramarins.



Randonnée en forêt  - © A.Brusini/CTGuyane
Randonnée en forêt - © A.Brusini/CTGuyane
À plus de 7 000 km de la métropole, la Guyane est un département qui nous réserve bien des surprises. La rencontre avec Jean-Luc Le West, Président Comité du Tourisme de la Guyane, nous permet  de mieux connaître cette terre française en Amazonie et les enjeux de son développement touristique.

JL Corgier : Vous êtes une nouvelle fois présent sur le salon professionnel IFTM Top Resa. Un rendez-vous incontournable pour la Guyane ?
 

Jean-Luc Le West, Président Comité du Tourisme de la Guyane - © JL Corgier
Jean-Luc Le West, Président Comité du Tourisme de la Guyane - © JL Corgier
Jean-Luc Le West : Je dirais même obligatoire, puisque je pense que quand on veut garder une certaine constance dans sa visibilité, il est important d'être présent comme chaque année à l'IFTM Top Resa. C'est un salon de professionnels B2B qui a son importance et qui donne cette visibilité. C'est aussi profiter d’un événement qui permet de mettre la destination Guyane en avant.

JL Corgier : Depuis le début de l'année, combien de visiteurs avez-vous accueillis sur le sol guyanais ?

Jean-Luc Le West : Sur le sol guyanais, un petit peu moins de 50 000 visiteurs, depuis le début de l'année, à peu près 47 000 pour être précis. C'est plutôt bon, c'est un pointage à fin juin, donc on devrait être cette année autour des 100 000 visiteurs annuels plus la clientèle endogène, parce que je crois qu'il faut aussi parler de tourisme endogène, on ne peut pas être présent ici et ne parler que de clientèle externe puisqu'aujourd'hui on essaye parallèlement de développer un tourisme local qui est important.

Camp Canopée - ©  A.Brusini/CTGuyane
Camp Canopée - © A.Brusini/CTGuyane

JL Corgier : Quels sont les profils de ces visiteurs ?

Jean-Luc Le West : Votre question est très intéressante, on a un profil qui est très souvent celui de gens qui oscillent entre 45 et 65 ans, qui sont CSP+, donc on a ce qu'on appelle une clientèle à forte contribution parce qu'effectivement la destination est chère, l'aérien coûte toujours aussi cher et ne s'est pas amélioré avec la crise. Et ce sont souvent des visiteurs qui sont en quête d'un autre tourisme, d'un tourisme durable, d'un tourisme vert, des gens qui sont plutôt aguerris au tourisme de masse et qui ont envie aujourd'hui de trouver une forme de tourisme de niche et qui viennent chercher ce tourisme qui est dans l'air du temps, qui est un tourisme durable.

JL Corgier : Alors quels sont les indices de satisfaction à leur départ après avoir découvert une partie tout du moins du territoire guyanais ?

Jean-Luc Le West : Ce qui peut nous inquiéter c'est d’être très surpris souvent.
Les gens ne s'attendaient pas du tout à cette forme de tourisme, à une destination telle que celle-ci, à cette Amazonie française qui nous singularise et que c'est un tourisme qui est beaucoup plus tourné vers l'intérieur, vers tout ce qui est écologique. Bien sûr vous l'auriez compris, un tourisme vert, un tourisme de découverte, un tourisme ethnique, car nous avons la chance d'avoir en Guyane une population autochtone, je dirais endémique à la Guyane, avec le peuple amérindien, qui s’attend à montrer et à démontrer. Et ce mariage culture et écologie, proche de la nature nous singularise avec un accueil qui est l'accueil qu'on peut réserver dans un contexte sud-américain, qui surprend beaucoup les clients. Donc il y a souvent une communication qui n'a peut-être pas été suffisante au départ, mais qui rend vraiment la destination très surprenante puisque je pense que les gens ne s'attendent pas à trouver cette Amazonie française avec cette faune et cette flore très diversifiées,  je le répète parce que c'est très important, et puis cette rencontre avec ces peuples tous très différents entre eux et qui vivent sur le même territoire depuis maintenant des centaines d'années.

Ça nous oblige quand même à nous interroger sur le sens de la communication que l'on veut y faire parce que c'est vrai que c'est important que les gens découvrent et soient surpris, mais c'est toujours bon aussi que les gens viennent chercher quelque chose de bien précis. Et je pense que c'est là où nous devons nous atteler à avoir cette communication bien ciblée qui permette aux uns et aux autres de véritablement venir chercher quelque chose de bien précis en Guyane.
 

Crique Balata - © J.Muller/CTGuyane
Crique Balata - © J.Muller/CTGuyane

JL Corgier Alors effectivement parce que l’on évoque malgré tout, et vous-même avez souligné certaines fois, les clichés tenaces sur l'image de la Guyane. Quels sont-ils ces clichés qu'il faut gommer en fait ?

Jean-Luc Le West : Je crois que ce sont des clichés, comme  la forêt hostile, je dirais que le seul danger en forêt c'est l'homme, c'est ce qu'il faut toujours se dire. Comme partout. Voilà, et la faune, la flore, elle est là, elle est présente, elle n’est encore pas trop impactée par la présence de l'homme, par ce qui peut se faire ailleurs, ce mélange, je dirais, d'une espèce de volonté économique de se développer et de préserver cette nature et cette biodiversité qui est à notre disposition, c'est vraiment un exercice de style naturel qui est fait en Guyane. Aujourd'hui, je rappelle qu’en Guyane, l'impact de l'homme, représente 1,6%, donc ce n'est rien. Mais il faut encore se préserver de cela tout en gardant une certaine forme de développement et de pérennisation des produits touristiques que nous avons en Guyane.

JL Corgier : Donc vous travaillez à donner une image de la Guyane pour une offre beaucoup plus attractive ?

Jean-Luc Le West : Alors attractive, mais précisons le bien, nos infrastructures et notre territoire ne se prêtent pas au tourisme de masse et ce n'est d'ailleurs pas notre vœu. Je veux dire, que c'est à l'image même de la typologie des clients qui viennent aujourd'hui en Guyane, qui sont une clientèle, je dirais, à fort revenu, c'est vrai, mais qui viennent chercher une certaine qualité de service, qui pour l'instant, a encore besoin de s'améliorer et c'est important pour nous.

Coq de Roche et singe Saïmiri - ©- PAG T.Deville/CTGuyane
Coq de Roche et singe Saïmiri - ©- PAG T.Deville/CTGuyane

JL Corgier : Donc il y a une importance pour l'éco-tourisme et pour une découverte de toute la richesse de la biodiversité ?

Jean-Luc Le West : C'est important. Alors quand on dit découverte, il faut aussi laisser découvrir la biodiversité. La biodiversité, vous savez quand on a plus de 1200 espèces d'arbres différents en Guyane, quand on a une faune qui est recensée à plus d'un millier d'espèces différentes, et je ne parle qu'en faune mammifère et autres, c'est important aussi de bien se dire que nous avons aujourd'hui toute cette image qui est là, cette faune qui est là, qui est finalement très canalisée par la nature elle-même, et que souvent nous avons la prétention de dire, ici en Guyane, selon un vieil adage « si tu prends moins à la nature, la nature te le rend ». Et je pense que depuis la nuit des temps, que ce soit les peuples amérindiens, les autres peuples qui sont venus constituer la Guyane, cette proximité avec la nature a toujours existé et rend le peuple guyanais naturellement, éco-responsable parce qu'effectivement ça fait partie de l'ADN des Guyanais.
Et je crois que c'est pour ça qu’il est intéressant de venir les découvrir, venir découvrir sa culture, sa gastronomie, qui est aussi très plurielle, puisque c'est une gastronomie très tournée vers la forêt. Et vous savez, c'est le seul peuple d'ultramarins qui consomme autant le fruit des palmiers. Mais c'est normal, quand on a cette flore et cette faune à sa disposition, on est véritablement tourné vers elle lorsqu'on parle de sa culture et de sa gastronomie.

Avant atterrissage en forêt - ©  A.Brusini/CTGuyane
Avant atterrissage en forêt - © A.Brusini/CTGuyane
JL Corgier : Les visiteurs font-ils part de certaines attentes, est-ce qu'ils émettent certains souhaits de découvertes plus particulières ?

Jean-Luc Le West : Il faut aussi que l'on reconnaisse ces qualités, comme on a beaucoup énuméré ces dernières minutes, mais aussi il faut savoir aussi que nous avons aujourd'hui la problématique du transport, de manière générale. Lorsqu'on fait du tourisme, il faut un transport. Aujourd'hui, le transport de masse, vous avez bien compris que ce n'était pas l'intérêt, mais il faut avoir toute une panoplie de moyens terrestres et autres pour pouvoir se déplacer, je rappelle que la Guyane est grande comme le Portugal ou comme l'Autriche. Pour aller d'un point à un autre, d'une ville comme Cayenne jusqu'à Maripasula, c'est 55 minutes de vol et vous êtes resté dans le même territoire. Donc c'est important. Alors vous savez, je viens de parler de vol, la problématique aujourd'hui en Guyane c'est le transport aérien et le transport intérieur, parce qu'il est important de pouvoir découvrir, redécouvrir des petites villes qui sont complètement enclavées dans la forêt, mais aussi les villes qui se trouvent le long du Maroni, avec aujourd'hui une dramatique fin d'exercice d'Air Guyane. C’ est importante aujourd'hui, que nous retrouvions une compagnie aérienne locale, gérée, je dirais, intelligemment et productivement, pour développer ce tourisme qui en a besoin et qui ne doit pas se cantoner seulement le long du littoral guyanais mais aussi à l'intérieur de la Guyane et qu'aujourd'hui il est important et rapide que nous puissions retrouver une compagnie aérienne intérieure qui nous permette de pouvoir faire découvrir aussi bien aux guyanais mais aussi bien aux gens qui viendraient nous visiter l'intérieur guyanais.

Wapa lodge, carbet duplex - © Aurélien Brusini
Wapa lodge, carbet duplex - © Aurélien Brusini
JL Corgier : Alors je pense que la population s'implique justement à faire découvrir la Guyane ?

Jean-Luc Le West : Vous savez, être Guyanais c'est avoir un sens né, de l'accueil. L'hospitalité est importante chez nous mais ça ne peut pas suffire, il faut aussi la canaliser, la cadrer et c'est je crois ce que les Guyanais ont compris depuis quelques années c'est qu'aujourd'hui notre sens de l’hospitalitéé ne suffisait pas, mais qu'il fallait aussi être dans des normes d'accueil qui soient des normes internationales, et nous permettre aujourd'hui d'ouvrir une autre forme de tourisme, ce que nous avons commencé. Nous avons une ligne aérienne qui s'est ouverte entre la République Dominicaine et la Guyane. Alors vous allez me dire quel est l'intérêt puisque ce sont deux grands pôles touristiques complètement différents ? Mais à partir de l'aéroport de Las Americas, c'est 64 destinations de plus qui nous sont ouvertes et qui permettent aux gens aussi bien des Etats-Unis, de l'Amérique centrale, du continent sud-européen, de venir aujourd'hui visiter la Guyane parce qu'on en entend parler, on ne sait pas ce que c'est, mais on a hâte de la découvrir.

JL Corgier : Quel premier bilan pouvez-vous tirer après l'ouverture de cette ligne ?

Jean-Luc Le West : Il est toujours très compliqué de tirer un bilan après 6 mois d'exploitation et surtout lorsque vous avez 2 mois de vacances dans ce bilan d'exploitation. Donc il y a un fort intérêt, il y a un besoin de communiquer et d'accompagner la compagnie Sky Eye se développe véritablement avec sa première ouverture, sur cet axe sud-américain. C'est une continuité, la Sky Eye a toujours été habituée au continent nord américain et Amérique centrale, mais jamais sur l'Amérique du Sud. Je sais que la compagnie a fait une demande pour modifier sa route, c'est-à-dire avoir une ligne Las Américas-Fort-de-France-Cayenne, une demande de droits de trafic est actuellement déposée sur le bureau de la DGAC. Elle est importante pour cette compagnie parce que ça lui permet de pouvoir rentabiliser.
Je rappelle qu'on parle d'un avion d'une centaine de places donc on ne parle pas de quelque chose d'extraordinaire, mais c’est important pour nous. Notre territoire a besoin de se désenclaver aussi bien en interne qu'en externe mais vous savez j'espère qu'on aura l'occasion de se revoir dans quelques années et on dira que cet enclavement était sans doute une chance pour la Guyane parce que ça la rend aussi confidentielle, ça la rend aussi singulière et ça la rend aussi mystérieuse, inquiétante. Je pourrais vous donner un tas de qualificatifs qui peuvent avoir un petit peu une connotation négative mais aussi avec une connotation positive et c'est pour ça que quand les gens découvrent la Guyane ils sont souvent surpris mais c'est peut-être aussi ce mélange de communication et d'accessibilité qu'il faut aujourd'hui travailler.

Les Îles du Salut, site de l'ancien bagne - © P. Baudon - ESA/CNES
Les Îles du Salut, site de l'ancien bagne - © P. Baudon - ESA/CNES

JL Corgier : Est-ce que vous avez d'autres projets de liaisons pour contribuer au désenclavement ?

Jean-Luc Le West : Écoutez, nous avons des porteurs de projets qui sont plus que sérieux, qui sont munis de toutes les autorisations légales vis-à-vis de l'administration aérienne française et européenne. Donc on sait qu'aujourd'hui, que nous avons des sources importantes, mais des sources qui ne sont pas européennes, puisque je vous rappelle que la Guyane est enclavée en Amérique du Sud, et il faut aujourd'hui que l'Etat, que l'Europe permettent à ces compagnies de pouvoir se poser en Guyane pour développer véritablement un réseau inter-sud-américain car la Guyane doit se développer en Amérique du Sud avec les Sud-Américains.

JL Corgier : Vous allez accueillir fin novembre les 30 candidates à l'élection de Miss France, donc bénéficier d’une belle visibilité. Qu'allez-vous leur faire découvrir ?

Jean-Luc Le West : Nous allons leur faire découvrir notre territoire dans un laps de temps très court. Donc je voudrais déjà m'excuser auprès de tous les guyanais qui ne pourront pas les voir parce que forcément elles viennent très peu de temps et pour des raisons de logistique évidentes il va falloir aujourd'hui leur montrer un maximum de choses en peu de temps, mais je peux vous dire une chose, c'est que les guyanais dans leur ensemble sont ravis et heureux de recevoir ces 30 Miss qui représentent la beauté, l'excellence et je dirais tout le côté glamour français, européen et surtout ultramarin.

Audrey Ho-Wen-Tsai, Miss Guyane 2023 - © Jean-Louis Corgier
Audrey Ho-Wen-Tsai, Miss Guyane 2023 - © Jean-Louis Corgier
Et je pense qu'il va falloir pour nous tout simplement être nous-mêmes et les accueillir tels qu'il se doit et puis peut-être donner une autre vision que tout ce qu'on a pu donner jusqu'à aujourd'hui avec ces voyages de Miss France, c'est leur donner le côté Amazonie française, c'est leur donner un côté différent, pas toujours tourné vers la mer bleue, les cocotiers, le sable blanc, mais leur donner un vrai contact avec la nature et puis permettre individuellement à chacune de ces demoiselles de véritablement découvrir quelque chose et quand elles rentreront dans leurs régions, elles seront pour nous les meilleures ambassadrices de la Guyane.

Pour bien préparer votre voyage : https://www.guyane-amazonie.fr

Comité du Tourisme de la Guyane à Paris
 5 Rue de Stockholm, 75008 Paris
Tél : 01 42 94 15 16 
bureauparisien@guyane-amazonie.fr

 
Dimanche 22 Octobre 2023
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